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Comment Slate procède au blanchiment des thèses sur « l’apartheid » israélien

par Marc Brzustowski

Le 3 août 2022, Slate publie un article signé par Ariane Bonzon « Apartheid, le mot qui fâche quand on l’applique à l’État juif »

http://www.slate.fr/story/231632/apartheid-etat-juif-israel-palestine-afrique-sud-antisionisme-antisemitisme-segregation

Slate est le Webzine de la gauche bobo-conservatrice, régulièrement vaincue à tous les scrutins, mais dont l’influence circule dans les arcanes du pouvoir. Le magazine en ligne s’est lancé autour de conseillers du Prince, comme Jacques Attali, Jean-Marie Colombani, ancien rédac-chef du Monde, avec l’appui de milieux d’affaires parisiens. 

Slate, une tragi-comédie commerciale

Slate (« Ardoise » en anglais, on va vite comprendre pourquoi) est resté un gouffre financier qui n’a jamais été bénéficiaire, a dû licencier les 3/5 e des journalistes et s’appuie, depuis 2017, sur ses pigistes. Cette danseuse de la  presse du gai Paris n’a jamais eu les moyens de ses ambitions.

On fait semblant d’avoir l’air, et on se donne licence à articuler la pensée de la politique étrangère française dans les limites conceptuelles qu’on juge utile à sa formulation. 

La veille du 14 juillet, pour prendre à revers les distraits, un florilège de 37 députés communistes, LFI et de la Nupes a émis une proposition de résolution assimilant Israël à un régime d’Apartheid. Entre le moment de la rédaction et la publication de l’article qui suit, au moins quatre Députés LFI ont retiré leurs signatures : Christine Pires Beaune -la seule à s’en être expliquée- la Rennaise Claudia Rouaux, qui signe sans réfléchir et les poids-lourds de LFI : Mathilde Panot, très en verve judéo-litigieuse, depuis sa prise de poste et Adrien Quatennens : il ne veut sans doute pas griller ses chances d’être le futur Mélenchon à la tête du mouvement, donc joue « l’apaisement ». C’était peu de temps après la saillie du Garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti contre le nouvel antisémitisme pro-Corbyn à l’Assemblée et le pamphlet de Michel Onfray, dans le Journal du Dimanche, le 30 juillet. 

Le droit à l’excès (l’extrême) si les outils conceptuels servent une cause

En revanche, dans Slate, on est « progressiste » et on va « de l’avant », jusqu’à la nausée :  si les antisionistes de l’Hémicycle vous disent qu’Israël est un « régime d’apartheid », ce n’est pas « infondé » (sic!). Ariane Bonzon, émargeant à l’IRIS de Pascal Boniface, qui est proche de Tariq Ramadan, mais aussi ancienne gloire du Monde diplomatique, compagne de route des pro-Palestiniens patentés Alain Gresh et Dominique Vidal, nous l’affirme, dans ce morceau d’ontologie : 

http://www.slate.fr/story/231632/apartheid-etat-juif-israel-palestine-afrique-sud-antisionisme-antisemitisme-segregation

Pour Ariane Bonzon, même si ces termes sont abusifs, caricaturaux, s’attirant la critique d’un antisémitisme à peine voilé, ce n’est pas grave : l’essentiel est qu’ils conservent une certaine « efficience » pour mener à la création d’un « État Palestinien ».  En somme, elle se fait l’avocate de l’utilitarisme propagandiste, disant que la fin justifie les moyens, que tous les coups sont permis, si la cause originelle est (ou lui paraît) « juste ». 

En quelque sorte, Slate et Bonzon veulent asséner au public français une nouvelle forme de machiavélisme, où peu importe le vin, du moment qu’au final, on ait l’ivresse : la diplomatie française obtiendrait le triomphe de l’un de ses chevaux de bataille favoris : la création de cet « État Palestinien », mode de résolution du néanmoins « État de presque-Apartheid » qu’elle énonce implicitement. 

Convergences : Alinsky à la Nupes et Bonzon, élève d’Alain Gresh

Il est toujours utile de savoir d’où parle celui qui tient le discours. En l’occurrence, Ariane Bonzon est une habituée des salons de l’IREMMO fondé par Alain Gresh, là où on refait le monde à la sauce tiers-mondiste (sous l’influence posthume de Henri Curiel). On y invite des chefs de mouvements sulfureux, comme Marwan Muhammad, directeur du Collectif contre l’Islamophobie, interdit en France pour ses pratiques de l’islam identitaire radical, cherchant à fracturer la société française, et dont Gresh, proche de Ramadan et des Frères musulmans, dit le plus grand bien.

Si la proposition de Bonzon, consistant à noircir le tableau pour faire progresser une cause, est choquante, pour l’intellectuel doté d’un minimum d’éthique, elle ne surprend guère ceux qui connaissent l’œuvre de Trotsky : « Si le soleil est contre-révolutionnaire, alors il faudra éteindre le soleil ». C’est aussi la pensée dominante à l’Institut Alinsky, qui forme les cadres de la NUPES : rupture, hystérisation et brutalisation de la chose politique pour « mobiliser les colères » et provoquer un renversement du pouvoir. 

Obtenir la condamnation d’Israël, État-paria, pour construire un État palestinien

Le but que s’est donné l’écrivaine-militante Ariane Bonzon est de passer une couche de vernis inoxydable sur des thématiques éculées, réchauffées, mais qu’elle pense, au moins en partie « fondées », parce qu’utiles à son objectif. Certes, le propos des parlementaires communistes et de LFI-Nupes est exagéré, mais en y regardant de plus près, ils prêcheraient le faux pour dire le vrai qui nous échappe : si Israël est un État Juif, par définition, il ne pourrait pas, en même temps, prétendre être « démocratique ».

Pour qui vit en Israël, au sein de la population mixte de Galilée, au-delà de l’insulte à l’intelligence, ces propos paraissent hors-sol. Comme si toute la critique française envers Israël était juste suspendue, sans aucun contact avec la réalité vécue. La rédactrice de cette bouée de secours pour NUPES en perdition agirait au nom d’un universalisme que la France, atteinte de wokisme, ne parvient plus à s’appliquer à elle-même. 

Où Bonzon puise-t-elle ses propos ? Dans des bribes de discours et de jugements de valeurs qui se tiennent dans les salons parisiens, ou au sein des ONG financées par le contribuable européen, quand ce ne sont pas les pétrodollars du Qatar. Et comme notre « journaliste » a eu de bons maîtres, elle nous assène ses imposantes références, quand on évoque Le conflit : Jean-Paul Chagnollaud, Charles Enderlin. On est là à l’école des mandarins indéboulonnables. Ils ont forgé l’université propalestinienne et formaté « l’information », dans les années 2000, au moment où éclate la seconde Intifada. La polémique, restée célèbre, concerne l’accusation moyenâgeuse de « meurtre rituel », imputée à l’armée de Défense d’Israël, au carrefour de Netzarim, le 30 septembre 2000[1]. Dans un autre style, celui des métiers dangereux, nous obtenons sensiblement la même  tragédie rejouée, après la disparition de Shireen Abu Akleh, dans des conditions de tirs croisés qui n’ont pu être élucidées, pour cause de blocage de l’enquête par la partie palestinienne. 

Pour redire la même chose que les 37 députés de la Nupes, mais sous une forme aseptisée, Bonzon s’appuie sur les témoignages contestés des officines avec pignon sur rue, en citant pêle-mêle : B’tselem, Amnesty, HRW, etc., toutes fans de la thèse de « l’Apartheid », pour les mêmes raisons utilitaristes que le fil d’Ariane Bonzon. 

Surtout, pour l’Israélien de la rue que je suis, la phrase suivante relève de la pure manipulation: 

« Pour les Palestiniens de Haïfa, l’inégalité du statut personnel dans l’État d’Israël »

Je mets au défi notre romancière de Slate de venir interroger des Arabes chrétiens, musulmans ou druzes de n’importe quel coin en Galilée, en commençant par Haïfa, pour essayer de leur faire dire qu’ils sont « Palestiniens d’Israël ». Ses propos ressemblent fort à ceux qu’on inculque à la jeunesse dans les manuels scolaires et dans la prêche quotidienne. Cela paraît, malheureusement, relever de cette mauvaise guerre idéologique que nous font les idéologues-journalistes français et leurs acolytes dans les ONG politisées. 

Tout au long de son « article », on ne trouve aucune once de factualité, relative à l’histoire du conflit, ou aux récents actes de terreur issus de Jénine ou Naplouse. Il ne se passe rien d’autre qu’une longue et lancinante litanie de dénégation idéologique. La revendication est claire : on doit avoir le droit d’employer des termes hors-contexte, quitte à défigurer le quotidien d’un pays dont on ignore à peu près tout. Car ce pays et celui-là seul, déplaît, juste parce qu’il a le culot d’exister sur une terre ancestrale des Juifs. Le moyen d’atténuer la douleur intellectuelle de le voir exister quand même et makgré tout, consisterait à imposer sans négociations ni cessation du terrorisme, un pays pour ceux qu’il est censé « opprimer » : les « Palestiniens d’Israël ». Incidemment, Madame Bonzon se fait complice des thèses du Transfert, où les « Palestiniens de Haïfa » devraient aller vivre ailleurs pour « vivre mieux » : est-ce si sûr ?

Rappelons que ce seul oxymore sans réalité juridique (« Palestiniens de Haïfa ») nie en soi l’existence de l’État en question : il ne serait qu’une superposition artificielle de l’histoire « coloniale », par-dessus cette population qui lui préexiste et lui survivra : « les Palestiniens », sans territoire ni frontières.

Par ses définitions sorties du néant, Madame Bonzon exige qu’on crée une dichotomie telle que Juifs et « Palestiniens d’Israël » ne se côtoient plus, se séparent vraiment en deux entités non fongibles et, qu’enfin, l’Apartheid dont on nous chauffe tant les oreilles, finisse par prendre quelque réalité. Autrement dit : « Si l’Apartheid n’existe pas, les islamogauchistes français l’inventeront ». 

On fait dire à ces conceptions sorties du chapeau le contraire de la vraie vie majoritairement vécue d’un pays, pour privilégier une politisation à outrance dont la plupart des Arabes d’Israël ne veulent pas.

L’extrême-gauche française et ses journalistes assermentés, dont Ariane Bonzon, remettent en cause la citoyenneté de cette minorité qui bénéficie de tous les droits que la majorité. Peut-être une enquête de terrain pourrait-elle éclairer la lanterne des journalistes de Slate.

Madame Bonzon vit tellement mal la mixité de plusieurs grandes villes israéliennes (elle cite Haïfa) qu’il lui faut absolument instiller des schismes que la réalité récuse, sauf situation exceptionnelle, comme en mai 2021. 

Tout l’idéologie antisioniste ne repose que sur ce socle, affirmant que, comme cet État met en avant son particularisme Juif -mais guère plus que les Francs, les Germains, les Anglo-Saxons, les Ukrainiens, etc. -, national et religieux, alors il mérite toute la haine de l’univers. Même si et quand il garantit, dans les moindres détails, les droits relatifs à l’État de tous ses citoyens. Un seul pays au monde s’attire autant de foudres injustifiées. Les pires dictatures, tous les grands massacres du XXème et du XXIème siècles échappent à l’examen de l’ONU, mais un petit village hébreu situé, au milieu d’un océan de pays arabes (22) et musulmans (57) ne cesse de les hanter.

Madame Bonzon n’a jamais mis les pieds dans une entreprise israélienne. Mes collègues arabes, musulmans, chrétiens et druzes viennent aussi bien d’Acco, de Beit Jann, de Haïfa, Nahariya, et je peux garantir sur la tête du prophète qu’ils ou qu’elles jouissent d’un statut d’égalité plus que proche de la perfection, et que personne à l’intérieur des entreprises ne fait de distinguo entre qui est qui : Ukrainiens, Russes, Chrétiens, Juifs, Arabes, Druzes… 

Il existe des réseaux de high-tech, tout autour de ma ville proche de Haïfa, qui lancent des programmes de formation et de recrutement des jeunes des villages arabes diplômés ou qui mériteraient de l’être, pour développer une économie plus performante, ouvrir d’autres start-up, entre Misgav et Kiryat Shmona, à la frontière libanaise. 

Mais, on recrute uniquement sur compétences, performances et envie d’aller de l’avant, au sein de la start-up Nation. Peu importe d’où tu viens, montre-moi ce que tu sais faire et surtout, innove à partir de ce que tu as envie de faire. Des notions qui vont totalement à l’encontre des attitudes et comportements sclérosés des « héritiers » marxistes-léninistes, dans l’université et les écoles de journalistes français. 


Les conclusions de Madame Bonzon, relèvent, au mieux du voyeurisme touristique, jamais confronté à la réalité de tous les jours. Au pire, c’est juste la fin du Stalinisme de salon à Paris, qui n’en finit pas de ressusciter dans la presse française, repêchant les égarés du Monde Diplomatique et de la révolution en fauteuil Louis XV. 


La Question de la Judée-Samarie (ou « Cisjordanie », comme on dit, sans se rendre compte qu’ainsi considérant les Palestiniens qui y habitent comme presque Jordaniens en quelque sorte, on suggère surtout à Israël de ne pas s’en occuper, une fois la ligne verte franchie) est avant tout sécuritaire. Il faut désamorcer les réseaux de Jénine, Naplouse et neutraliser les incendiaires de Gaza, comme dernièrement, Taysir Jabari, le chef des missiles du Djihad Islamique. En le faisant, on sauve des vies juives, mais aussi arabes, en évitant une guerre régionale qui s’étend jusqu’en Iran. 

L’UE, Israël et l’Égypte ont signé, mi-juin, un protocole d’accord pour permettre à l’UE d’importer du gaz naturel israélien. Depuis l’invasion russe de l’Ukraine, Bruxelles veut rompre avec sa dépendance aux énergies fossiles russes et cherche à renforcer ses partenariats avec d’autres pays, notamment au Moyen-Orient. Israël va envoyer 20 milliards de m3 de gaz, qui sera ensuite, liquéfié en Egypte (qu’Israël fournit déjà, ainsi que la Jordanie), puis acheminé vers l’Europe, pour qu’elle puisse affronter les rigueurs de la saison froide.

Mais ces intellectuels de gauche mieux pensante croient-ils vraiment qu’ils boycotteront le gaz israélien cet hiver ? Qu’est-ce que Slate et Madame Bonzon comptent faire de ces accords ? Les brûler pour se chauffer à leurs passions meurtrières ?

À moins que ce gaz n’appartienne aux « Palestiniens de Haïfa » -sujet d’un prochain article de Mme Bonzon ?


[1] Il s’agit d’une célèbre fabrication médiatique souvent appelée« affaire Al-Dourah », fabriquée par un vidéaste palestinien avec l’aide de Charles Enderlin. Voir P.A. Taguieff, (2010) Nouvelle propagande antijuive :l’Affaire al-Dura en perspective, Paris, PUF, 560 pages

 

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